Exposition sur les mannequins d'artistes au musée Bourdelle
Comme je lis beaucoup de magazines, je remarque avec intérêt toutes les expositions parisiennes, ou autres, de saison dans toute la France....etc.
Et il m'est arrivé de profiter d'un séjour parisien pour faire quelques découvertes merveilleuses....parfois !
Je viens de découvrir quelque chose d'assez inhabituel, et qui me pairait bien, je crois ?
Je vais vais, si vous voulez bien, vous le faire partager !
Du 1er avril au 12 juillet 2015, intéressante exposition Mannequin d’artiste, Mannequin fétiche, pour la réouverture après 8 mois de travaux du musée Bourdelle.
Cette idée originale d’exposition retrace l’histoire de ce secret d’atelier qui n’en est pas tout à fait un, de ce compagnonnage et des liens extrêmement forts qui se tissent entre l’artiste et ce soutien constant qu’est le mannequin (pas le modèle, mais le mannequin), de la Renaissance au XXe siècle...
Vous y surprendrez de rares mannequins d’artistes du XVIIIe siècle à nos jours, des "poupées articulées" capables de prendre toutes les positions, des mannequins de vitrine de Siegel ou d’Imans, des peintures de Gainsborough et de Courbet les mettant en scène dans des paysages ou des scénettes, ou encore de Burne-Jones, Kokoschka bien sûr, Beeton, de Chirico, Annigoni, des dessins de Salviati, de Millais, la planche de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert qui leur est consacrée, des brevets d’invention, et évidemment des photographies de Bellmer, de Man Ray, List et Denise Bellon...
Il s’agit d’une première tentative aussi de lever le voile sur la relation artiste-mannequin avec près de 160 œuvres issues de collections publiques et privées, françaises et étrangères.
Ces mannequins (Pascal est en noyer, et Pascaline en chêne), du début du XXe siècle, ont été fabriqués par Sennelier, quai Voltaire, fournisseur de matériel pour artistes. En revanche, achetés par la maison de couture Schiaparelli, ils ont longtemps trôné en vitrine, comme les fétiches de la maison.
Qu’il soit de petite taille ou grandeur nature, monolithique ou articulé, le mannequin d’artiste aide l’artiste dès la Renaissance à progresser dans l’art de la composition, dans le rendu des drapés, et des proportions anatomiques, parce qu’il est plus docile et toujours disponible.
Ainsi ce substitut du modèle vivant est-il un partenaire indispensable au processus de création, supportant les doutes et les colères de l’artiste à toute heure et en tout lieu, et n’émettant jamais aucune critique, pas plus que d’encouragement d’ailleurs, au cours de la phase de réalisation de l’œuvre par l’artiste. Du moins de façon audible... Miroir...
L’histoire du mannequin d’artiste est tout à la fois étrange, surprenante et paradoxale. Dans son traité d’architecture, le sculpteur florentin Filarete (1406-1469) recommandait l’usage d’une "petite figure de bois aux membres articulés" pour apprendre à dessiner les draperies "di naturali".
De bois, et parfois de cire, ce petit modèle s’avérait tout aussi utile pour "mettre une histoire ensemble", poser une situation, et assoir la composition. En revanche, pour la vraisemblance des détails d’un costume comme du tombé d’un drapé, la grandeur nature s’imposait. Les plus grands maîtres usèrent de cet accessoire : Michel-Ange, Titien, Poussin, Gainsborough, Degas, Courbet, les préraphaélites, Cézanne, prenant grand soin de ne pas le laisser transparaître une fois l’œuvre achevée.
Fabricant inconnu. Fin du XVIIIe siècle. Mannequin ayant appartenu au peintre Walter Sickert, 1860-1942, et supposé avoir appartenu antérieurement au peintre William Hogarth, 1697-1764 (pin, tilleul, chêne, métal, toile de jute et peinture à l’huile).
Les mannequins d’artistes de la Renaissance sont naturellement venus des petites statues religieuses ou rituelles, au bâti de bois simple, enrichi de stuc et de papier mâché. Et ils se propagèrent en Europe, à partir des villes italiennes.
Puis, quand ils s’articulèrent, aux XVIe et XVIIe siècles, l’origine de leur fabrication, d’une très grande finesse d’exécution, et nettement sexuée, devint prioritairement l’Allemagne et l’Autriche.
En revanche, dès la fin du XVIIIe siècle, Paris s’impose comme le centre de fabrication de ces mannequins dits alors "perfectionnés", reproduisant fidèlement le corps humain dans ses proportions les plus rigoureuses. La compétition devenait alors féroce, entraînant le dépôt de brevets, à la recherche de modèles toujours plus légers et plus souples.
Les artistes exploitent ce simulacre dont "l’inquiétante étrangeté" croise celle des poupées de mode ou des mannequins de vitrine. Et les "mannequins parisiens rembourrés", de crin de cheval, de liège, ou de fibres de coco, nécessitaient alors plus d’une année de travail... et coûtaient facilement 2 ans de salaires d’un modèle vivant !
Au fil des XIXe et XXe siècles, la figure du mannequin devient le sujet même de l’œuvre, et les artistes jouent de cette présence sur un mode tantôt réaliste, tantôt ludique, quand cela ne devient pas franchement érotique.
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Sans titre (Reposing II) – Alan Beeton – Beeton Family Estate
La Soffitta del Torero – Pietro Annigonni – ADAGP, Paris, 2015
Cette exposition a été organisée par le musée Bourdelle et le Fitzwilliam Museum, où elle fut présentée pour la première fois en 2014.
Les commissaires sont Jane Munro du Fitzwilliam Museum de Cambridge, Amélie Simier, conservatrice en chef du Patrimoine, et Jérôme Godeau, du musée Bourdelle.
Mannequin d’artiste, mannequin fétiche, du 1er avril au 12 juillet.
Liens : http://www.bourdelle.paris.fr/fr/exposition/mannequin-dartiste-mannequin-fetiche
http://www.offi.fr/expositions-musees/musee-bourdelle-1569/mannequin-dartiste-mannequin-fetiche-56646.html