Audrey, racontée par son fils...
Luca Dotti raconte sa mère Audrey Hepburn
Luca Dotti devant les couvertures de presse de sa mère, dont celle de Point de Vue-Images du Monde, à l'occasion du mariage de la jeune star, en 1954, avec Mel Ferrer.
Audrey Hepburn à Rome pendant le tournage de Guerre et Paix en juin 1955, photographiée par Norman Parkinson. L'actrice porte une robe Givenchy.
L'exposition Portraits d'une icône, à la National Portrait Gallery, présente le destin d'une des stars les plus photographiées du XXe siècle. De ses débuts comme ballerine, à Londres, à son engagement pour l'enfance défavorisée. Son plus jeune fils nous raconte la mère au-delà de l'étoile, sa popularité qui perdure. Visite guidée avec Point de Vue, tout en tendresse...
Une nouvelle expo, des livres, des documentaires... Votre mère est partout.
Notre étonnement est quotidien. Pour mon frère Sean et moi, c'est un cadeau. Nous nous disons toujours que les gens vont finir par l'oublier, mais c'est tout le contraire. Les nouvelles générations découvrent maman. Elle est incroyablement contemporaine et populaire. Peut-être plus encore maintenant qu'à l'époque de sa mort, en 1993. Et les éloges dont on la couvre nous font très plaisir.
Comment expliquer cet engouement?
Elle le doit à sa "normalité". Les stars d'aujourd'hui sont souvent jugées trop audacieuses, et la plupart du temps connues par leur seule génération. Ma mère opère le lien entre tous. Les plus vieux se souviennent de son talent, de son travail à l'Unicef. Les jeunes, sur internet, découvrent une icône pure, abordable. Je crois qu'il y a encore une autre dimension: le besoin de gentillesse. Et c'est ce qu'elle dégageait, dans la réalité comme à travers les photos de cette exposition.
Cette douceur la caractérise?
Sans rien enlever à sa force de caractère. Sous son air frêle et élégant, c'était une femme décidée, engagée, et une travailleuse acharnée. Le réalisateur et critique Peter Bogdanovich la décrivait, et j'aime beaucoup cette définition, comme un "Iron Butterfly" -un papillon d'acier.
Comment est née cette exposition?
Au cours d'un dîner, j'ai rencontré Terence Pepper, le directeur du département photographie de la National Portrait Gallery. Son bureau, à deux pas d'ici, abritait autrefois un night-club où ma mère a débuté. Il rêvait, depuis plus de trente ans, d'organiser une monographie sur Audrey Hepburn. Terence, en chercheur passionné, a découvert des archives exceptionnelles, et nous avons prêté une quarantaine de photos de notre propre fonds. La plupart lui ont été offertes par les artistes et lui sont dédicacées. Ces oeuvres sont passées entre ses mains et leur charge émotive est très forte.
Ce type d'hommage aurait plu à votre mère?
Maman est née en Belgique, mais elle était anglaise et très fière de sa nationalité britannique. C'est ici, à Londres, qu'elle s'est formée sur le plan artistique et je pense que cette reconnaissance dans "sa ville" aurait eu à ses yeux la même importance qu'un Oscar. Peut-être même plus.
Elle aimait poser?
Nous n'en avons jamais vraiment discuté. Avedon disait: "L'appareil est amoureux d'elle, c'est impossible de faire une mauvaise photo!" Je crois que son talent, justement, c'est qu'elle ne posait pas. Elle était toujours naturelle, et pas seulement sur les photos d'artistes. Dans mon livre Audrey à Rome paru l'automne dernier, elle est parfaite même sur les clichés pris sur le vif. Elle disait que sa grande chance était d'avoir appris la danse, une discipline qui donne de la grâce. Et elle insistait d'ailleurs beaucoup sur notre propre maintien. Comme beaucoup de mères!
Avait-elle conscience de son incroyable beauté?
Elle se considérait comme un "mouton noir", dotée d'un physique et de traits singuliers, qui avait seulement eu la bonne fortune d'apparaître au moment propice. Maman disait: "J'ai beaucoup de chance d'avoir été distinguée. Demain je serai probablement passée de mode." Alors que c'est justement parce qu'elle était "hors norme" qu'elle est devenue intemporelle. Quand elle a débuté, les actrices contemporaines étaient très différentes. Marilyn Monroe était son opposé, sur bien des plans, surtout physique. Même Elizabeth Taylor avait un autre "caractère".
Étaient-elles rivales?
Différentes. Pour Vacances romaines, Paramount voulait Taylor, mais elle était déjà engagée sur un autre tournage. Maman avait passé des essais, pas très concluants. Elle avait un trac fou, elle butait sur son texte et sa prestation était médiocre. À la fin, la caméra tournait encore et elle a demandé timidement si c'était terminé, si elle pouvait partir... Et c'est seulement à ce moment que le directeur de casting a réagi: "La voilà ma princesse Ann!"
Quel est votre regard de fils sur l'icône?
Question difficile. Au moment de sa disparition, je n'avais que 22 ans, et je trouvais pénible de voir étalé en première page des magazines ce que je considérais comme ma vie privée. Je faisais une différence entre la star et la maman. La naissance de mes trois enfants m'a forcé à une remise en question. Quand mon fils aîné a eu 11 ans, il s'est naturellement intéressé à sa grand-mère. Je me devais de lui livrer ma vision de notre histoire. J'ai écrit Audrey at home -Audrey à la maison-, pas une biographie, mais un livre plein de scènes de notre quotidien. Le résultat, rassurant, c'est que j'ai enfin découvert qu'il n'y avait pas deux Audrey, mais une femme qui a toujours su conserver son intégrité. Elle recevait beaucoup d'amour et elle donnait plus encore. Surtout dans son engagement humanitaire.
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Liens : http://www.lexpress.fr/styles/famill...w0ccLYMEoxk.99
et :
http://www.34-magazine.com/fr/photos...sition-unique/