Diego Vélasquez (1599-1660) est un des principaux noms de la peinture espagnole et mondiale. Éminent représentant de ce que l’on a appelé le mouvement baroque, il a été adulé par les plus fameux artistes de l’histoire.
Velazquez
Ainsi en fut-il de Goya. Des impressionnistes, dont Renoir, qui l’érigèrent en référence absolue. D’Édouard Manet qui admirait ses colorations vives, et pour qui il était "le peintre des peintres", et même le "plus grand peintre qui ait jamais existé". De Pablo Picasso encore, qui réinterpréta avec la plus grande application Les Ménines, ou de Salvador Dali, faisant de même, après avoir réalisé Vélasquez peignant l’infante Marguerite avec les lumières et les ombres de sa propre gloire.
Les Menines
Malgré cela, et de façon surprenante, cette exposition monographique sera la première à être consacrée en France à son œuvre, comme si nous avions traversé une période d’"invisibilité de Vélasquez".
Diego Vélasquez (c’est le nom de sa mère) nait en 1599 à Séville. Après un court apprentissage, pénible mais formateur, chez le maître Francisco Herrera le Vieux, il fait, dès 12 ans et durant 6 années, ses classes dans l’atelier de Francisco Pacheco (1564-1644), peintre lettré, influent, censeur officiel de peinture pour l’Inquisition à Séville, et également maître du peintre Alonso Cano. À 19 ans, Vélasquez épouse Juana, fille de Pacheco, dont il eut 2 filles.
Portrait ( présumé ) de son épouse Juana
Dans cette ville alors la plus riche et ouverte d’Espagne, les qualités de sa peinture sont bientôt remarquées, d’un naturalisme rappelant Le Caravage (dont il n’avait pourtant jamais encore vu de toiles), et ancrées sur le clair-obscur. Vélasquez se rend sur recommandations de son beau-père à la Cour de Madrid où, dès 1623, il est nommé peintre du roi, puis peintre de chambre en 1628. Cette charge, la plus élevée accessible aux peintres de la Cour, allait lui permettre une grande proximité avec le Roi Philippe IV.
Vélasquez met aussi à profit sa nouvelle condition pour contempler à loisir les chefs-d’œuvre des collections de peintures royales, rassemblant notamment en nombre des toiles du Titien, de Véronèse, de Bassano et du Tintoret.
Pour les historiens d’art, les facilités de cet accès devaient faire faire à ses inspirations comme à ses expressions picturales de remarquables progrès.
En 1628, Vélasquez se lie d’amitié, travaille et échange intensément avec Rubens, à qui il fait visiter les peintures royales, au cours d’un séjour d’un an que le Hollandais effectue à Madrid.
Quelque temps plus tard, en tant que peintre du roi d’Espagne, qui lui offre un voyage d’étude de 2 années en Italie, Vélasquez aura également accès à de véritables trésors artistiques des maîtres anciens alors peu montrés, dont par exemples les chambres vaticanes avec les fresques de Michel-Ange et de Raphaël. Son retour à Madrid verra sa période la plus aboutie et la plus féconde.
" La toilette de Vénus "
Diego Vélasquez, Infante Marguerite (1651-1673) (détail), 1659, huile sur toile, 126 x 106 cm, Kunsthistorisches, Vienne © Kunsthistorisches Museum, Vienne
Il effectuera vers 1649 un autre voyage de près de 2 années en Italie, tâchant d’accroître, par ses achats d’œuvres d’art, les déjà opulentes collections de peintures royales d’Espagne.
Sur ses dernières années, encore davantage comblé d’honneurs et de titres, dont celui de Maréchal de cour, Vélasquez atteint alors un niveau international de reconnaissance indépassable, ayant portraituré tant de têtes couronnées, la cour papale et le Saint Père Innocent X lui-même, passé maître aussi bien en peinture paysagère, en nu féminin, en peinture d’histoire, et même, comme il s’y était essayé dans sa jeunesse avec succès, dans la scène de genre et la nature morte.
Ainsi ce contemporain de Van Dyck, du Bernin et de Zurbaran demeure-t-il l’une des plus importantes figures de l’histoire de l’art, chef de file de l’École espagnole, peintre attitré du roi Philippe IV, quand l’Espagne domine le monde, avec Léonard de Vinci, Raphaël, Michel-Ange, Titien, Caravage et Rembrandt.
Philippe IV, chasseur
La rareté de ses tableaux (guère plus d’une centaine) comme leur concentration au musée du Prado ont rendu particulièrement difficile l’organisation d’une véritable rétrospective. Ce fut cependant le défi que s’imposèrent le Louvre et le Grand Palais, qui joignirent leur force en collaboration avec le Kunsthistorishes Museum de Vienne, et avec l’appui généreux du musée du Prado.
Certains prêts tout à fait exceptionnels ont ainsi pu être obtenus à l’instar de la Forge de Vulcain (Prado), de même que des chefs-d’œuvre absolus comme la Vénus au miroir (Londres, National Gallery) ou le Portrait d’Innocent X (Rome, Galerie Doria Pamphilj), si cher à Francis Bacon, et universellement au pinacle de l’histoire de l’art.
L’exposition entend présenter le panorama le plus complet possible de l’œuvre de Diego Vélasquez, depuis ses débuts à Séville jusqu’à ses dernières années et l’influence que son art exerce sur ses contemporains. Elle se donne en outre pour mission de porter les principales interrogations et découvertes survenues ces dernières années, exposant, dans certains cas pour la première fois, des œuvres récemment découvertes dont L’Éducation de la Vierge (New Haven, Yale Art Gallery) ou Portrait de l’inquisiteur Sebastian de Huerta (collection particulière).
" Education de la Vierge "
Une première section évoquera le climat artistique de l’Andalousie au début du XVIIe siècle, mettant en perspective les premières œuvres de Vélasquez et restituant l’émulation de l’atelier de Pacheco autour de peintures et de sculptures d’Alonso Cano et de Juan Martinez Montañez.
Vers 1620, son style évolue vers un caravagisme plus franc, en correspondance à ses premiers contacts avec Madrid et la peinture d’alors, la sienne comme celles de ses contemporains, espagnols ou italiens, recherchant une peinture plus « moderne ».
Dès ses débuts à la cour, la conception du portrait de Vélasquez évolue, passant d’un naturalisme bouillonnant à des formules plus froides et solennelles, plus en accord avec la tradition espagnole.
Son premier voyage en Italie est illustré par des œuvres vraisemblablement exécutées à Rome ou immédiatement à son retour (Vue des jardins de la Villa Médicis, Rixe devant une auberge...). Ces chefs-d’œuvre de la première maturité offrent en outre l’occasion d’aborder le paysage, partie moins traitée de son travail. Stimulé par l’exemple de Rubens, Vélasquez apporte une fraîcheur et une liberté nouvelles aux arrières plans de ses portraits en extérieur réalisés pour les différentes résidences royales.
La partie centrale de cette deuxième section est consacrée à la figure de Balthazar Carlos. Héritier attendu de la Couronne, il porte les espoirs dynastiques des Habsbourg d’Espagne à l’apogée du règne de Philippe IV. À mi-parcours, l’exposition s’arrête sur la peinture mythologique, sacrée et profane de Vélasquez dont la Vénus au miroir constituera le point d’orgue.
" Balthazar Carlos "
La 3e et dernière partie consacre la dernière décennie du peintre, son influence sur les peintres vélasquésiens (los Velazqueños) et sa prééminence de peintre portraitiste, à la Cour de Madrid, puis à Rome autour d’Innocent X lors du second voyage en Italie. Ses deux principaux collaborateurs seront évoqués, l’Italien Pietro Martire Neri et Juan de Pareja, esclave assistant du peintre, qui l’affranchira, et sujet d’un formidable portrait exécuté par Vélasquez (New York, Metropolitan Museum).
Les derniers portraits royaux exécutés par le maître espagnol seront aussi présentés, en regard de ceux de son gendre et plus fidèle disciple : Juan Bautista Martinez del Mazo, derniers témoignages du style de Vélasquez, autour du tableau de La Famille du peintre de Vienne et d’une version réduite des Ménines de Kingston Lacy, avant que d’autres influences, celle de Van Dyck notamment, ne s’exercent sur les peintres de la génération suivante, dont le plus virtuose, Carreño de Miranda, nous livre les impressionnantes images ultimes des derniers Habsbourg d’Espagne.
Le commissaire de cet événement est Guillaume Kientz, conservateur au département des peintures du musée du Louvre, la scénographe sera de Maciej Fiszer.
Vélasquez. Du 25 mars au 13 juillet 2015 au Grand Palais, galeries nationales, entrée square Jean Perrin. Métro Champs-Élysées-Clemenceau ou Franklin-D.-Roosevelt. Dimanche et lundi de 10 à 20h, du mercredi au samedi de 10 à 22h. Fermé le mardi. 13 ou 9€ (16-25 ans, demandeurs d’emploi, famille nombreuse). Gratuit pour les moins de 16 ans, bénéficiaires du RSA et du minimum vieillesse (sous réserve de modification).
L'Infante d'Espagne et future reine de France, la fille de Philippe IV d'Espagne épousera en juin 1660 Louis XIV. Particulièrement sollicitée, les demandes de portraits de l’infante Marie-Thérèse ne tarissaient pas. L’œuvre du Metropolitan peinte vers 1652 par Velázquez était sans soute une étude destinée à de futurs portraits.
Portrait d’Innocent X (1649-51), Galerie Doria-Pamphilj, Rome.
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